Pindare (-518 à -438)

Traduction de Faustin Colin (1841)

NÉMÉENNE VIII



A ΜÉGAS, FILS DE DINIS, EGΙNÈTE , VAINQUEUR AU STADE

Strophe 1. — Noble puberté, messagère de Vénus aux baisers d'Ambroisie, toi qui reposes sur les paupières des vierges et des jeunes hommes ; tu livres l'un aux mains d'une aimable violence, l'autre au malheur. Il est doux cependant, lorsqu'on ne faillit en aucune rencontre, de pouvoir s'assurer de fortunés amours.

Antistrophe 1. — Tels on les vit dispenser autour de la couche de Jupiter et d'Égine, les présents de Cypris. Il en sortit un rejeton, roi d'Énone (152), illustre par son bras et par sa prudence. Souvent la foule s'empressa pour le voir; car, sans combat, la fleur des héros voisins voulait de plein gré se soumettre à ses lois;

Épode 1. — Et ceux qui commandaient le peuple de la stérile Athènes et les Pélopides de Sparte. Suppliant d'Éaque (153), j'embrasse ses sacrés genoux, et pour cette ville chérie et pour ses citoyens, leur (154) apportant une mitre (155) lydienne (156) avec des chants variés, et j'offre aux deux courses de Dinis et à celle de son père Mégas cette parure néméenne. Car, enfanté par un dieu, le bonheur des hommes est plus durable.

Str. 2. — C'est un dieu aussi qui jadis, dans Chypre, fille de la mer, combla Cinyras de richesses (157). Je m'arrête d'un pied léger, je respire avant de parler encore. Car tout a été dit sur tout. Livrer des pensers nouveaux à l'épreuve de la critique est chose périlleuse (158). Les discours sont pâture pour l'envie. Toujours elle s'attaque aux bons et ne lutte pas avec les mauvais.

Ant. 2. — Elle dévora aussi le fils de (159) Télamon qu'elle fit rouler à terre d'un coup d'épée. Oui, l'homme sans éloquence, mais d'un grand cœur, l'oubli l'opprime dans une triste querelle, tandis que le plus noble prix est offert au mensonge astucieux. Car les Grecs honorèrent Ulysse de leurs suffrages secrets, et privé des armes d'or, Ajax provoqua le trépas.

Ép. 2. — Et toutefois bien différentes étaient les blessures taillées dans le corps fumant des ennemis par leurs lances guerrières, soit en combattant autour d'Achille expiré, soit dans les autres journées de luttes sanglantes. Mais depuis longtemps elle existait cette conseillère funeste, compagne des discours séduisants, amie du dol, ignoble fléau, qui exalte le nom flétri des lâches.

Str. 3. — Que de telles mœurs ne soient jamais les miennes, ô mon père, ô Jupiter, mais que je suive les voies droites de la vie, afin qu'en mourant, je ne laisse point à mes enfants un nom avili ! Les uns convoitent l'or et des terres immenses. Pour moi, puissé-je être aimé de mes concitoyens jusque dans la tombe, louant les choses louables et semant le blâme sur les forfaits !

Ant. 3. — La vertu grandit comme s'élance un arbre sous les vertes rosées; entre les hommes sages et justes, elle s'élève vers le ciel humide. Nombreux sont les offices des mortels qui nous aiment. Ils'éclatent surtout dans les luttes; la joie aussi désire mettre sous les yeux un monument (160) fidèle. O Mégas (161), te rendre la vie

Ép. 3. — M'est impossible (et l'issue des folles espérances est vaine); mais je puis, pour ta famille et pour les Chariades, dresser la glorieuse pierre des Muses, en mémoire de pieds deux fois vainqueurs. Je suis heureux de répandre un digne éloge sûr un exploit. Les chants magiques d'un poète ont souvent adouci les fatigues. Il y avait des hymnes d'éloge bien avant la querelle d'Adraste et des Cadméens.


(152) Ègine.

(153) C'est dans son temple que l'ode est chantée : Dinis vient lui offrir sa couronne.

(154) Tournure poétique.

(155) Allusion aux bandelettes de laine placées sur les couronnes.

(156) Au son des flûtes lydiennes.

(157) Elles étaient proverbiales comme celles de Crésus. Cinyras était plein de générosité.

(158) Voilà pourquoi il faut s'arrêter un moment et réfléchir.

(159) Ajax.

(160) Si elle est dignement célébrée par la poésie.

(161) Père de Dinis

 


Pindare - Néméennes

 

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