Pindare (-518 à -438)

Traduction de Faustin Colin (1841)

PYTHIQUE IV



POUR ARCESILAS DE CYRÈNE VAINQUEUR A LA COURSE DES CHARS

Strophe 1. — C'est aujourd'hui que tu dois te présenter chez un mortel que j'aime, chez le roi de Cyrène aux prompts coursiers, afin que, dans les fêtes d'Arcésilas, ô Muse, tu souffles le doux vent (74) des hymnes que j'ai promis aux Latoïdes (75) et à Pytho; là, jadis, la prêtresse (76), assise près des aigles (77) d'or de Jupiter (Apollon (78) n'était point absent), prédit que Battus (79), souverain de la féconde Libye, après avoir quitté son île sacrée (80), fonderait sur un mamelon blanc une cité (81) aux beaux chars,

Antistrophe 1. — Et accomplirait ainsi, sous la dix-septième génération  (82), l'oracle de Médée dans Théra (83), oracle qu'exhala de sa bouche immortelle la fille intrépide d'Éétès, la reine de Colchos. Or, voici ce qu'elle dit aux demi-dieux, nautonniers du belliqueux Jason : «Ecoutez-moi, fils des «plus vaillants mortels et des dieux; je dis que, hors de «cette terre (84), battue par les flots, un jour la fille (85) d'Epaphus (86) plantera une tige (87) de villes chères aux mortels, dans les domaines de Jupiter Ammon.»

Épode 1. — « Ils remplaceront les dauphins aux courtes ailes par d'agiles coursiers, et, au lieu de rames, manieront des rênes et des chars prompts comme la tempête; cette prédiction fera de Théra la métropole de cités puissantes : jadis, à l'embouchure du lac Tritonide (88), un dieu (89), sous une forme humaine, l'annonça en présentant une glèbe, gage d'hospitalité à Euphémus, descendu de la proue. Et d'en haut, l'auguste Cronos (90), fils de Jupiter, approuva d'un coup de foudre.

Str. 2. — « II (91) nous était apparu quand nous suspendions au navire l'ancre à la dent d'airain, frein du rapide Argo. Pendant douze jours, nous avions traîné sur le dos d'une terre déserte la poutre marine (92) qui, par mes conseils, avait été tirée de la mer. Tout à coup, seul, un dieu s'avance sous les traits d'un mortel vénérable, et d'abord il nous adresse des paroles amies comme ces hôtes généreux qui convient aussitôt à leur table les étrangers qui surviennent.

Ant. 2. — «Mais le désir d'un doux retour ne nous permettait pas de nous arrêter. Alors il se dit Eurypyle, fils  de l'immortel Géochus Ennoside (93). Mais il nous voit pressés, et soudain saisissant une glèbe, il s'empresse de «tendre vers nous de la main droite ce gage improvisé d'hospitalité. Le héros (94) n'hésite point, il s'élance au «rivage, tend la main vers sa main, et reçoit la glèbe (95) mystérieuse. Et j'apprends que, du vaisseau, elle est allée «s'engloutir dans les flots amers,

Ép. 2. — «Emportée un soir par l'onde humide. Certes j'en avais (96) souvent recommandé la garde aux serviteurs qui allègent nos travaux; mais leur zèle s'est oublié. Ainsi, dans cette île même de Théra, s'est dispersée, avant le temps, l'immortelle semence de la vaste Libye. Que si, rendu à sa famille dans la sainte Ténare, Euphémus eût jeté cette glèbe près du soupirail des enfers, le fils de Neptune Hippius (97), le roi que la fille de Titye, Europe, mit au monde sur les rives du Céphise,

Str. 3. — «Aurait vu son sang, à la quatrième génération, s'emparer, avec les Danaens (98), de cet immense continent (99). Car, à cette époque (100), ils sortent de la grande Lacédémone, du golfe d'Argos et de Mycènes. Maintenant la couche de femmes étrangères (101) lui donnera la race des mortels choisis, qui, venus dans cette  île (102) avec la faveur des dieux, engendreront le héros (103) dominateur des contrées aux sombres nuages. A celui-ci, dans son temple éclatant d'or, Apollon redira les oracles

Ant. 3. — «Près du sanctuaire de la Pythie. Enfin les temps s'accomplissent, et sur ses vaisseaux il a (104) transporté une colonie au sol fertile de Nilus Cronide.» Tels furent les vers que prononça Médée (105). Immobiles, dans l'étonnement et le silence, les héros divins écoutèrent ces paroles profondes (106). Heureux fils de Polymneste (107) ! c'est toi que, d'accord avec ce discours, l'oracle exalta soudain par la voix de l'abeille (108) de Delphes; elle ordonna de te saluer trois fois, et te proclama le roi de Cyrène marqué par les destins,

Ép. 3. — Au moment où tu demandais aux dieux le moyen de délier ta langue (109) captive. Et maintenant encore, après tant d'années, vigoureux comme le printemps aux fleurs purpurines, Arcésilas est le huitième rejeton de cette race. C'est à lui qu'Apollon et Pytho viennent de donner la gloire aux courses équestres de la contrée (110). Pour moi, je le placerai sous la garde des Muses avec le bélier à la toison d'or. Car, de celte toison cherchée par les Minyens (111) à travers les flots, naquirent les honneurs que leur départirent les dieux.

Str. 4. — Quelle fut donc l'origine de cette expédition? quel péril les enchaîna de ses durs liens (112) d'acier? Il était arrêté que Pélias (113) mourrait par les mains ou par les embûches inévitables des nobles Eolides (114). Mais, à son âme prudente, était parvenu l'effrayant oracle, prononcé au centre (115) de la terre, mère de riche forêts. Il devait sans cesse être sur ses gardes contre tout homme chaussé d'un seul pied, qui, des retraites de la montagne, descendrait dans les brillantes plaines de l'illustre lolcos,

Ant. 4. — Soit qu'il fût étranger ou citoyen. Enfin il paraît, armé de deux javelots, ce terrible mortel. Un double vêtement le couvre ; l'un, propre aux Magnésiens (116), dessine ses membres admirables; l'autre, dépouille d'un léopard, le défend de tous côtés contre les froides pluies : jamais les boucles de sa belle chevelure n'ont été coupées ; mais elles ondoient sur ses larges épaules. Et bientôt, marchant tête haute, il s'est arrêté, l'air intrépide, au milieu d'un peuple nombreux.

Ép. 4. — On ne le connaît point; cependant, parmi ceux qui le contemplent, on en vient à dire : «Ce n'est point  Apollon, ce n'est point le dieu au char d'airain, l'époux (117) d'Aphrodite. Dans la féconde Naxos ont péri, dit-on, les «enfants d'Iphimidée (118), Otus et toi, Éphialte, guerrier «audacieux. Titye (119) aussi est tombé sous une flèche sortie «de l'invincible carquois de Diane, afin que chacun n'aspire qu'à de légitimes amours.»

Str. 5. — C'est ainsi que l'on s'entretenait. Or, sur un char brillant, traîné par d'agiles mules, Pélias arriva en toute hâte. Et soudain il s'étonne à l'aspect du cothurne trop connu dont le pied droit seul est chaussé. Mais , cachant sa frayeur dans son âme, il prend la parole : «Quelle terre, ô étranger, reconnais-tu pour patrie? Quel sein blanc de femme terrestre t'a engendré ? Sans te souiller par d'odieux mensonges, dis-moi ton origine.»

Ant. 5. — D'un ton ferme et calme, il lui répondit: «J'apporte l'enseignement de Chiron (120). Car j'arrive de son antre, où m'ont nourri Chariclès et Philyre, chastes filles du centaure. Parvenu à l'âge de vingt ans accomplis, sans qu'avec elles une seule de mes actions ou de «mes paroles ait été équivoque, je reviens dans ma patrie (121) pour revendiquer l'antique royaume de mon père, gouverné contre le droit, et donné jadis par Jupiter au roi Éole et à ses descendants.

Ép. 5. — «Car je sais que l'injuste Pélias, entraîné par un esprit aveugle, a violemment dépouillé mes parents, qui régnaient au nom des lois. Je voyais à peine la lumière, que ceux-ci, redoutant l'iniquité d'un maître audacieux, simulèrent mes funérailles dans leur palais en deuil, au milieu des cris de femmes éplorées, tandis que «sous des langes de pourpre ils me faisaient fuir secrètement, protégé dans ma route par la nuit, et confiaient mon enfance au Cronide Chiron.

Str. 6. — «Maintenant vous connaissez tout ce que j'avais à dire. La demeure de mes aïeux aux blancs coursiers, généreux citoyens, indiquez-la moi sans détour. Car, fils d'Éson, je suis né dans ces lieux, je ne suis point venu dans une terre étrangère. Le divin Centaure m'appelait du nom de Jason.» Ainsi dit-il. A peine est-il entré, que les yeux d'un père le reconnaissent. Des paupières du vieillard jaillissent des larmes ; car il était joyeux au fond du cœur à la vue de ce noble fils, le plus beau des mortels.

Ant. 6. — Au bruit de son arrivée accourent bientôt deux frères d'Éson. Phérès ne vient pas de loin; il a quitté la fontaine Hypéréide (122); Amythaon vient de Messène; leurs fils Admète et Mélampe s'empressent avec joie de saluer un parent (123). Au milieu des banquets, Jason les captive par des paroles de miel, leur fait dignement les présents de l'hospitalité, ne songe qu'à exciter leur allégresse, et pendant cinq jours et cinq nuits leur prodigue la divine fleur du plaisir ;

Ép. 6. — Mais, au sixième, le héros, dans un grave discours où il expose tout dès l'origine, s'ouvre à ses proches. Ils l'approuvent. Aussitôt il sort de sa demeure avec eux; et ils marchent au palais de Pélias, et, se précipitant dans l'intérieur, ils s'y établissent. Instruit de l'événement, le fils (124) de Tyro, à l'élégante chevelure, vient lui-même à leur rencontre. Alors, d'une voix affable, Jason épanchant de douces paroles, jette ainsi la base d'un sage entretien : «Fils de Neptune Pétréen (125),

Str. 7. — «L'esprit des mortels n'est que trop prompt à préférer au bon droit un gain frauduleux, quoiqu'ils marchent ainsi vers une fin cruelle. Mais vous et moi, assurons-nous, en réglant nos désirs sur la justice, des jours tissus de joie. Vous le savez, la même mère (126) a nourri Créthéus et l'audacieux Salmonée. Descendus de ces princes à la troisième génération (127), nous contemplons les rayons dorés du soleil ; mais les Parques, dès que les parents se haïssent, courent se cacher de honte (128).

Ant. 7. — «Non, il ne convient pas que l'airain des glaives ou des javelots règle le partage des grandeurs de nos pères. Pour moi, je vous abandonne volontiers et les brebis, et les blonds troupeaux de bœufs et les vastes pâturages que vous avez enlevés à mes parents pour grossir vos richesses. Je ne regrette point que ces biens agrandissent votre maison; mais ce sceptre de roi, ce trône où jadis assis le fils de Créthéus (129) dictait des lois à un peuple de cavaliers,

Ép. 7. — «Rendez-le moi, sans que nous ayons à gémir tous deux; craignez de susciter quelque nouveau malheur.» Telles furent ses paroles. Pélias, à son tour, lui répond aussi avec sang-froid : «Ainsi ferai-je. Mais déjà la vieillesse m'accable, tandis que vous êtes dans la fleur d'une bouillante jeunesse. C'est à vous d'apaiser les dieux infernaux. Car Phrixus (130) ordonne que l'on aille recueillir son âme dans le palais d'Eétès (131), et enlever l'épaisse toison du bélier sur lequel jadis il échappa aux flots

Str. 8. — «Et aux traits impies d'une marâtre (132). Un songe merveilleux est venu m'avertir. J'ai consulté l'oracle de Castalie (133) pour m'éclairer. Et il me commande d'équiper au plus tôt un navire pour ce voyage. Subissez donc cette épreuve de bon gré; et, je le jure, je vous rendrai le trône et l'empire! Pour garantie de nos inviolables serments, prenons tous deux à témoin Jupiter Généthliu (134).» Le pacte consenti, on se sépare. Jason, impatient,

Ant. 8. — Dépêche partout des hérauts pour annoncer la prochaine expédition. Bientôt accourent trois guerriers (135) indomptés, fils de Jupiter Cronide, d'AIcmène aux yeux étincelants et de Léda ; deux héros chevelus, enfants d'Ennoside (136) et redoutés par leur bravoure, ont quitté Pylos et la crête du Ténare; tous deux parviendront au faite de la gloire: c'est Euphémus, c'est toi, courageux Périclymène. A. eux se joint un fils d'Apollon, le père de la lyre et du chant, le fameux Orphée.

Ép. 8. — Mercure aussi, au caducée d'or, jette dans les périls de cette entreprise ses deux fils Echion et Eurytus, bouillants de jeunesse. D'autres qui habitent le pied du Pangée sont arrivés à la hâte. Le cœur tout ravi, Borée, leur père, le roi des vents, a pressé en souriant le départ de Zétès et de Calaiï, guerriers qui dressent sur leur dos deux ailes de pourpre. C'est Junon qui alluma dans l'âme de ces demi-dieux la douce , l'irrésistible envie de monter

Str. 9. — Sur le navire Argo, afin qu'aucun d'eux ne consumât lâchement sa vie en restant près d'une mère; mais qu'ils pussent tous, même au risque de la mort, conquérir avec les héros de leur âge la plus belle récompense de leur vertu. Dès que la fleur des nautonniers est descendue à Iolcos , Jason les compte et les loue. Déjà le devin Mopsus, qui lui dit l'avenir d'après les augures et les sacrés oracles, a fait embarquer la troupe entière sous de bons auspices. Lorsque les ancres sont suspendues à l'éperon,

Ant. 9. — Une coupe d'or entre les mains, le chef, sur la poupe, invoque le père des immortels, Jupiter tonnant, les tourbillons impétueux des flots et des vents, et les ténèbres et les routes de la mer, et les jours propices et la chance d'un heureux retour. Or, du sein des nues, la voix favorable du tonnerre lui répondit, et les éclairs jaillirent en feux étincelants. Les héros respirèrent, pleins de foi dans les signes de Dieu. Puis le devin les exhorte

Ep. 9. — A se courber sur les rames, et les flatte des plus douces espérances. Leurs mains actives exécutent la manœuvre infatigable. Ils arrivent, poussés par les brises du midi, à l'embouchure de l'Euxin. Là, ils élèvent une enceinte sacrée à Neptune (137), dieu des flots. Car ils avaient rencontré un troupeau fauve de buffles de Thrace, et les fondements (138) récents d'un autel en pierre. Cependant, jetés dans un affreux danger, ils conjurent le maître des navires

Str. 10. — De les soustraire au choc violent de rochers (139) qui s'entre-heurtent. C'étaient deux écueils vivants qui roulaient avec plus d'impétuosité que les bataillons des vents retentissants. Mais bientôt leur mort signala le passage des demi-dieux. Ils entrèrent ensuite dans le Phase, et combattirent les noirs Colchidiens dans les États même d'Éétès. Alors la déesse aux flèches acérées, Cyprine, ayant attaché une bergerette aux mille couleurs sur les quatre rayons d'une roue inébranlable, apporta de l'Olympe

Ant. 10. — Aux mortels cet oiseau du délire (140), et apprit au sage Esonide (141) des prières et des enchantements, afin que Médée perdit tout respect pour sa famille, et que l'amour de la Grèce agitât ce cœur en feu sous le fouet de Pitho (142). Et vite elle l'instruit à subir les épreuves paternelles. Avec de l'huile, elle compose un baume qui doit guérir les plus âpres douleurs, et le lui donne. Tous deux conviennent de s'unir par les doux liens du mariage.

Ep. 10. — Cependant Eétès, aux yeux de tous, arrête sa charrue d'acier, ses bœufs qui soufflent de leurs rouges naseaux des torrents de flamme, et déchirent tour à tour le sol de leurs ongles d'airain. Il les conduit seul, les soumet au joug, puis il les pousse en traçant des sillons en ligne droite, et fend le dos de la terre soulevée par glèbes à la profondeur d'une brasse. Alors il s'écrie : «Qu'il achève ma tâche, le roi, le chef, quel qu'il soit, de ce navire! et il emportera

Str. 11. — La dépouille immortelle, la brillante toison «aux franges d'or.» A ces mots, Jason jette de côté son manteau de safran (143) et se met à l'œuvre, plein de foi en Dieu. Mais la flamme ne le trouble point; l'étrangère (144) aux mille talismans l'a instruit. Il tire la charrue, il assujettit avec des lanières invincibles le cou des taureaux, enfonce l'aiguillon douloureux dans leurs énormes flancs, et parcourt l'espace prescrit en robuste héros. Secrètement affligé, Eétès ne peut retenir un cri d'admiration.

Ant. 11. — Et les compagnons du vigoureux guerrier tendent vers lui des mains amies, le couronnent de verdure et l'accueillent avec de douces paroles. Et bientôt le superbe fils (145) du soleil indique l'endroit où le glaive de Phryxus a déployé la brillante toison. Il espérait que le héros ne pourrait accomplir ce labeur. En effet, elle était suspendue dans une forêt, et serrée par les mâchoires dévorantes d'un dragon plus large et plus long qu'une galère à cinquante rames, façonnée sous les coups du fer.

Ép. 11. — Mon retour serait lent par la route des chars; car le temps me presse. Je connais un sentier qui abrège. Sur beaucoup d'autres je l'emporte (146) en habileté. Il tua par son adresse , ô Arcésilas, le dragon aux yeux verts, au dos tacheté, et enleva Médée, sa complice, la meurtrière (147) de Pélias. Ils pénétrèrent dans les eaux de l'océan, dans la mer Erythrée (148), chez les femmes de Lemnos, homicides de leurs époux, où ils ouvrirent une lutte solennelle d'athlètes pour un vêtement (149),

Str. 12. — Et se marièrent. Ainsi, dans des champs étrangers, le destin marqua le jour ou les nuits qui reçurent le premier rayon de votre bonheur. C'est là que parut la race d'Euphémus à jamais immortelle. Plus tard, après avoir partagé la vie des hommes Lacédémoniens, elle émigra dans l'île appelée autrefois Calliste (150). C'est de là que Latoïde (151) vous envoya dans la terre de Libye pour l'agrandir par la faveur des dieux, et gouverner la cité divine de Cyrène au trône d'or avec les conseils d'une sagesse éclairée. Maintenant, ayez la pénétration d'Œdipe.

Ant. 12. — Si le tranchant d'une cognée enlève ses branches au grand chêne et flétrit son admirable beauté, quoique stérile, il rend encore témoignage de lui-même, lorsque le feu de la tempête vient le frapper, ou que, pressé par de superbes colonnes dans le palais d'un maître étranger, il soutient péniblement son fardeau, loin de la terre natale (152).

Ép. 12. — Or, vous êtes le médecin que les temps demandent, et Péan honore vos jours; ne touchez que d'une main légère à la plaie encore ouverte. Bouleverser une cité est chose facile, même aux faibles. Mais la rasseoir sur ses bases est une œuvre ardue, à moins que tout à coup un dieu ne vienne éclairer les princes. A vous ce rôle tissu de gloire. Osez consacrer tous vos soins au bonheur de Cyrène.

Str. 13. — Réfléchissez aussi sur cette maxime d'Homère (153): «Un bon messager apporte toujours à une cause un grand relief.» Une muse aussi s'honore par un noble message. Cyrène et l'illustre maison de Battus ont reconnu dans Démophile (154) une âme pleine d'équité. Car, jeune avec les jeunes gens, on le prend, dans les conseils, pour un vieillard qui a vécu cent années. Il impose silence aux cris de la calomnie; il sait haïr les méchants,

Ant. 13. —Ne combat jamais l'homme de bien et ne couve aucun projet (155). En effet, parmi les hommes, l'occasion échappe vite; il la connaît et la suit en homme libre, non en esclave. Cependant il est bien douloureux, dit-on, de connaître le séjour du bonheur et d'en être exilé par la force. Oui, Démophile, loin de sa patrie, loin de ses biens, est un Atlas qui se débat sous le poids des cieux (156). Mais quoi? l'immortel Jupiter a pardonné aux Titans, et quand le vent tombe il est à propos de changer la voile (157).

Ep. 13. — Il souhaite, après avoir subi une mortelle infortune, de revoir enfin ses foyers, de prendre part encore avec tout l'abandon de la jeunesse, aux banquets célébrés près de la fontaine d'Apollon (158), et, sa docte lyre 191 à la main, au milieu de citoyens paisibles, de goûter le repos, sans nuire à personne, sans être lui-même en butte à aucune attaque. Alors, ô Arcésilas, il vous dirait quelle source de vers immortels s'ouvrit pour lui dans Thèbes, qui lui a donné l'hospitalité (159).

 

(74) Pierre Charron , de la Sagesse. livre I, ch. 24, dit que l'espérance allume de son doux vent nos fols désirs.   

(75) Apollon et Diane.

(76) La Pythie.

(77) Ils étaient sur une pierre blanche à l'entrée du temple, et représentaient la puissance de Jupiter, sous les auspices duquel la Pythie proclamait les oracles d'Apollon

(78) Quelquefois il était, disait-on, à Délos.

(79) Voyez l'argument.

(80) Théra.

(81) Cyrène.

(82) A partir d'Euphémus I.

(83) Ile de la mer Egée où le Lacédémonien Théras conduisit une colonie.

(84) De Théra.

(85) Libye.

(86) Fils de Jupiter et d'Io.

(87) Cyrène.

(88) Lac de l'Afrique propre.

(89) Un Triton, sous les traits d'Eurypyle, prince de la Cyrénaïque.

(90) Un des Argonautes, aïeul des Battiades qui régnèrent en Libye.

(91) Le dieu.

(92) Les Argonautes passèrent, en retournant dans leur patrie du Phase dans l'Océan, de l'Océan dans la mer Erythrée , de la mer Erythrée dans le lac Triton , après avoir transporté à travers les terres leur vaisseau tout démonté. Ils sortaient du lac Triton lorsqu'un dieu vint leur offrir l'hospitalité en Libye.

(93) Surnoms de Neptune : le premier signifie qui embrasse la terre; le second , agitateur.

(94) C'est Médée qui parle; elle accompagnait les Argonautes qui retournaient en Grèce:

(95) Euphémus.

(96) Cette glèbe remise aux mains des Argonautes annonçait qu'un jour les descendants de l'un d'entre eux , les Battiades seraient les souverains de la Libye.

(97) Euphémus I.

(98) Ou Achéens.

(99) De la Libye.

(100) Époque de la grande invasion du Péloponnèse par les Doriens vers 1100. Les Danaens ou Achéens attaqués par les Doriens émigrèrent à Théra avec les Minyens et les Égides.

(101) Des Lemniennes.

(102) A Théra.

(103 Battus.

(104) Battus.    

(105) En Libye.

(106) Le Jupiter qui répand sur l'Egypte les bienfaits du Nil : style d'oracle.

(107) Battus.

(108) La prêtresse.

(109) Battus était bègue ; c'est le sens étymologique de son nom.

(110) Aux jeux pythiques où se rendent les peuples voisins de Pytho.

(111) Thessaliens. Jason, leur chef, était d'Iolcos, en Thessalie.

(112) En grec Clous.

(113) Pélias, oncle de Jason, avait usurpé le trône qui revenait à Éson , père du jeune héros.

(114) Jason était fils d'Eson, fils de Créthée, fils d'Éole.

(115) A Delphes.

(116) Peuple de Thessalie.

(117) Mars.

(118) Femme d'Alocus qui régnait sur l'Asopie; elle eut deux enfants de Neptune : Otus et Éphialte voulurent escalader le ciel.

(119) Il voulut attenter à l'honneur de Latone.

(120) Je ne mentirai point.

(121) A Iolcos.

(122) Près de Phères en Thessalie.

(123) Jason, leur cousin.

(124) Pélias.

(125) Le Neptune des rochers : il avait écarté des rochers pour donner un libre cours au Pénée , en Thessalie.

(126) Enarée.

(127) Pélias était petit-fils de Salmonée, et Jason petit(lis de Créthée: ils avaient pour aïeule commune Énarée.

(128) Elles nous abandonnent : dès lors plus de bonheur.

(129) Éson, père de Jason.  

(130) Fils d'Atbamas, roi de Thèbes, et persécuté par sa belle-mère Ino. Il chercha un asile en Colchide avec Hellé, sa sœur, qui périt dans les flots.

(131) Roi de Colcbos.

(132) Ino.

(133) De Delphes.

(134) De qui l'on descend ou qui préside à la naissance. Jason et Pélias descendaient de Jupiter par Éole.

(135) Hercule, Castor et Pollux.

(136) Surnom de Neptune qui signifie agitateur.

(137) Chef de la race des Euphémides ; dieu de la mer qu'ils allaient franchir.

(138)  Ce lieu s'appelait Hiéron, sur la côte d'Asie. Les dis de Phrixus y avaient élevé un autel aux douze grands dieux; les Argonautes en retrouvèrent les débris et consacrèrent à Neptune une enceinte dans laquelle l'antique monument était renfermé. Ils offrirent au dieu des mers un sacrifice de buffles de Thrace, c'est-à-dire de Bithynie ; les Bithyniens étalent Thraces d'origine

(139) Les Symplégades.

(140) La bergerette était chez les anciens un emblème des agitations inquiètes de t'amour. On s'en servait dans les charmes pour faire naître celtt passion.

(141) A Iason.

(142) Déesse de la persuasion.

(143) Chez les anciens, la couleur de safran comme celle de pourpre était la couleur des héros et des princes.

(144) Médée.

(145) Éétès.

(146)  Je connais l'art des transitions rapides.

(147)  Plus tard Médée fit périr Pélias en conseillant à ses filles de le tuer et de jeter ses membres dans une chaudière d'eau bouillante pour le rajeunir.

(148) Qui baigne la partie orientale et méridionale de l'Afrique. Les Argonautes revinrent en Grèce en passant du Phase dans l'Océan , de l'Océan dans la mer Erythrée, de la mer Erythrée dans le lac de Triton par terre, de ce lac dans la Méditerranée, puis à Théra, puis à Lemnos.

(149) Vêtement fait par des femmes : ceci rappelle les écharpes données aux chevaliers dans les joutes du moyen âge.

(150) Théra.

(151) Apollon.

(152) Images un peu énigmatiques qui signifient: «Un prince doit respecter le peuple qui est toujours la force de l'état, soit qu'on le prive des grands , soit que la guerre civile éclate, soit qu'un tyran l'opprime. » On conçoit pourquoi Pindare s'entoure de précautions en adressant de sages avis à un prince qui a sévi récemment contre une révolte.

(153) Iliade, XV, v. 207.

(154) Exilé dont Pindare demande le rappel.

(155) Qui puisse encore inquiéter Arcésilas.

(156) II est accablé par l'exil.

(157) Arcésilas aussi ferait bien de changer de politique.

(158) Appelée Cyré; elle a donné son nom à Cyrène.

(159) Il y a connu Pindare dont les vers immortaliseront Arcésilas.

 


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