Tibulle - (-50 à -19)Tibulle (en latin Albius Tibullus) est un poète romain élégiaque né vers 50 av. J.-C. et mort en 19 av. J.-C.. Avec Virgile et Horace, c'est un des inventeurs de la poésie champêtre.
Tout ce qu'on sait de Tibulle, c'est ce que nous en disent ses Élégies ainsi qu'un passage d'Horace et une biographie anonyme tardive. Il naît vers 50 av. J.-C. dans une famille équestre (riches chevaliers) campagnarde et aisée, mais dont la fortune avait été sérieusement écornée par les redistributions de terres aux vétérans en 41 av. J.-C., mesure qui toucha également Virgile, Horace et Properce. La propriété familiale se situait sur le territoire de Pedum, entre Tibur et Préneste. On suppose qu’il perdit son père dès sa plus jeune enfance et qu’il fut élevé entre sa mère et sa sœur. Tibulle était l'un des poètes les plus distingués du siècle d'Auguste. D'après les textes, il était un homme beau et riche et serait venu à Rome à l'âge de ses études. Marcus Valerius Messalla Corvinus fut son protecteur constant et fit de lui un des favoris de son cercle. Tibulle prit part aux deux expéditions militaires menées par Messalla en Gaule et en Orient. Son amitié avec Horace est attestée par les deux pièces que ce dernier lui adressa : l’ode I, 33 et l’épître I, 4. Sa mort suivit de très près celle de Virgile, et la quasi-simultanéité de ces deux disparitions ne manqua pas de frapper les esprits. Selon Jean-Yves Maleuvre, cette tragique coïncidence ne serait pas le pur jus du hasard. J.-Y. Maleuvre met alors en cause la responsabilité de l’empereur Auguste En ce qui concerne Tibulle, ses soupçons se fondent particulièrement sur l’analyse de l’épître I, 4 d’Horace et de l’élégie III, 9 des Amores d’Ovide. Selon lui Tibulle aurait été un opposant du régime augustéen et un adepte assidu de la cacozelia latens, ou « écriture secrète » - qu'auraient aussi pratiquée Virgile, Horace, Properce et Ovide. Jean-Yves Maleuvre prétend s'appuyer sur une lecture attentive des deux pièces qu’Horace a adressées à Tibulle. L’épître I, 4, par exemple, précise que ce poète réputé tendre et inoffensif devait, dans ses élégies, « vaincre les crépuscules de Cassisus de Parme » : or, Cassius de Parme était l’un des assassins de Jules César, et son calame valait une dague. Selon J.-Y. Maleuvre Tibulle pouvait aussi difficilement oublier qu’Auguste avait été le grand maître d’œuvre des spoliations de –41. Cette interprétation de l'œuvre de Tibulle et de la poésie augustéenne, qui bouscule la doxa, fait actuellement l'objet d'âpres discussions parmi les spécialistes.
Le Corpus Tibullianum nous a transmis sous son nom 4 livres d’élégies, dont seuls les deux premiers sont aujourd’hui considérés comme authentiques. Le poète chante ses amours tumultueuses pour deux femmes sadomasochistes, Délie et Némésis, ainsi que pour un jeune garçon du nom de Marathus. Tel est du moins l’alibi. Livre I : 10 élégies. Il fut publié en -26, -25. Livre I Il compte 10 élégies publiées du vivant de Tibulle, mais qui ne sont pas chronologiques. On ne peut donc pas dire laquelle précède l'autre : 5 élégies à Délie, 3 élégies à Marathus et 2 pièces isolées (1 élégie à Messala et 1 élégie contre la guerre). Élégie 1 : Tibulle refuse la guerre et la richesse qu'elle procure. Il prône l'idéal d'une vie simple, à la campagne, avec Délie. Cette élégie
se situe après la maladie de Tibulle à Corfou. « Il faut se réjouir, dit-il, car la mort peut survenir à chaque instant. » (Cf. Philosophie du « carpe diem ».) Livre II Le livre II semble inachevé, au terme de la sixième élégie. Mais les pièces de vers sont écrites dans l'ordre chronologique. Élégie 1 : Cette pièce rustique évoque la purification des champs : c'est une hymne à la campagne, à ses fruits, à ses divinités,
à Cérès et à Amour. Livre III Il contient : 6 élégies de Lygdamus Livre IV On distingue 3 parties importantes : pièce 1 : panégyrique à Messala.
Un style pur et élégant, une âme tendre et teintée de religiosité, où la passion amoureuse s’unit à un amour sincère de la nature, telles seraient, selon la tradition, les marques propres du génie tibullien. Mais ce n’est là qu’une partie de la vérité, ou plutôt ce n’est qu’une face de la médaille. Car à côté du Tibulle tendre, il y a le Tibulle violent et même furieux. À côté du Tibulle pieux, il y a le blasphémateur. À côté du Tibulle élégant et poli, il y a l’homme grossier et vulgaire. À côté de l’amoureux de la campagne, il y a le citadin qui écrase de son mépris les gens et les choses de la terre. Ce n’est pas rendre justice à Tibulle que de vouloir ignorer ces profondes disparités ou de les minimiser systématiquement en les mettant au compte d’une prétendue variatio qui n’explique rien. Une autre
solution consiste au contraire à traquer sans complaisance toutes les dissonances qui parsèment cette poésie, jusqu’à faire apparaître l’invisible schéma qui préside à la succession
des élégies, à savoir l’alternance de deux locuteurs irréconciliables, l’Ego-Poète et l’Ego-Prince. Un schéma précieusement sanctionné par une stricte égalité
numérique entre ces deux voix, comme c’est le cas pour les élégies de Properce.
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Tibulle
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