Arthur Rimbaud (1854-1891) Recueil : Derniers vers (1872)
La Rivière de Cassis
La Rivière de Cassis roule ignorée En des vaux étranges : La voix de cent corbeaux l’accompagne, vraie Et bonne voix d’anges : Avec les grands mouvements des sapinaies Quand plusieurs vents
plongent.
Tout roule avec des mystères révoltants De campagnes d’anciens temps ; De donjons visités, de parcs importants : C’est en ces bords qu’on entend Les passions mortes
des chevaliers errants : Mais que salubre est le vent !
Que le piéton regarde à ces clairevoies : Il ira plus courageux. Soldats des forêts que le Seigneur envoie, Chers corbeaux délicieux
! Faites fuir d’ici le paysan matois Qui trinque d’un moignon vieux.