Jean-Antoine de Baïf (1532-1589)

Bien, je l'ay dit ...



Bien, je l'ay dit, je le confesse,
Que nul ne te pourroit aimer
Autant que je t'aime, Maistresse,
Sçachant mieux qu'autre t'estimer:
Car d'autant que je cognoy plus
Et tes beautez et tes vertus,
D'autant ma Francine je doy
Mettre plus grande amour en toy.

Un autre moins digne, peut estre,
Du premier coup s'éblouira,
Et ne te pouvant pas conoistre
Un fol amour en souffrira,
Pour un rayon de ta beauté
Perdant de raison la clarté,
Et par trop vaine passion
T'offrira son affection.

Mais dy: quel service agreable
D'un tel fol pourras tu tirer,
Qui te criant non pitoyable
Ne fera rien que souspirer,
Que t'ennuier de ses ennuis
Qu'il prendra les jours et les nuits,
Pour ton amour, comme il crira,
Mais par sottise il languira.




Jean-Antoine de Baïf

 

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