Que n’ai-je mes esprits un peu plus endormis, Mon cerveau plus pesant, et l’âme plus grossière Pour ne sentir si fort une douleur meurtrière, Qui fait que sans repos, languissant je gémis.
Mes sens sensibles trop, ce sont mes ennemis Qui, époints jusqu’au vif d’une douleur trop fière, Ont perdu le repos, la liberté première, Pour trop sentir le mal qu’en eux
ils ont permis.
Si je n’eusse à clair vu ta grâce et ton mérite, Mon mal serait léger, et ma peine petite ; Mais pour voir, pour connaître et sentir jusqu’au fond
Ta grâce, ta valeur, ta rigueur ennemie, Mes yeux, esprits et sens, trop clairs, trop vifs, trop prompts, Sont meurtriers, sont tyrans, sont bourreaux de ma vie.